Par , publié le 5 septembre 2024

Le procès était historique. Le verdict l’est encore plus. Début août, Google a été reconnu coupable de pratiques anticoncurrentielles par la justice américaine. Le juge chargé de l’affaire a estimé que la société de Mountain View avait ainsi pu maintenir illégalement son quasi-monopole dans la recherche en ligne – elle s’accapare près de 90% du marché aux États-Unis, selon une estimation citée dans le jugement. Et qu’elle avait aussi “pu augmenter les prix des publicités textuelles (les résultats de recherche sponsorisés, ndlr) sans aucune contrainte concurrentielle significative”. Google, qui a décidé de faire appel, risque de se voir imposer d’importants changements pouvant se répercuter sur son chiffre d’affaires. Et aussi un démantèlement, même si ce scénario semble le moins probable.

Accord avec Apple – Ce verdict est l’aboutissement d’une longue procédure, lancée il y a quatre ans sous la présidence Trump. Puis, poursuivie par l’administration Biden. Le département de la Justice reprochait en particulier à Google d’obliger les fabricants de smartphones Android à installer sa barre de recherche, sous peine de ne plus avoir accès à l’indispensable boutique d’applications Play Store. Même chose pour son navigateur Chrome, sur lequel Google est le moteur par défaut. Autre grief : le géant américain a signé une multitude d’accords commerciaux, notamment avec Apple, Samsung et Mozilla, le concepteur de Firefox, pour s’assurer d’être le moteur par défaut de leur navigateur. “Les gens n’utilisent pas Google parce qu’ils n’ont pas le choix, ils l’utilisent parce qu’ils le veulent”, assuraient ses avocats.

“Pouvoir monopolistique” – Cette défense n’a pas convaincu le juge. Il a d’abord estimé que Google avait bien un “pouvoir monopolistique” dans la recherche en ligne et dans les publicités textuelles de recherche. Il a ensuite considéré que les accords commerciaux avaient un “effet significatif” pour protéger son monopole. Autrement dit: la société profite de la position dominante d’Android et de sa puissance financière pour empêcher l’émergence de véritables rivaux, en limitant leur distribution, ce qui ne leur permet pas d’atteindre une taille critique. Selon le juge, cela se traduit par l’absence d’incitation à investir et à innover, à la fois pour les moteurs existants que pour les nouveaux entrants. Ce qui ne fait que renforcer la position de Google, qui peut réinvestir une partie de ses profits liés à la recherche.

Vers un démantèlement ? – Le département de la Justice doit désormais proposer des mesures correctives au juge. Selon Bloomberg, il pourrait militer pour un démantèlement de la société, l’obligeant à séparer son moteur de recherche de Chrome, d’Android ou encore de sa plateforme de publicités AdWords. Un scénario radical que le gouvernement américain avait tenté d’imposer, en vain, à Microsoft en 2000. Plus probablement, les accords commerciaux avec Apple et autres pourraient être interdits. Ou financièrement limités. Un écran de sélection du moteur de recherche par défaut pourrait être imposé sur Chrome et Android, comme c’est le cas en Europe. Et Google pourrait être contraint de partager certaines de ses données avec ses rivaux. Ces remèdes pourraient cependant ne pas être mis en place avant la fin de la procédure d’appel.

Pour aller plus loin:
– Les Etats-Unis veulent démanteler la machine publicitaire de Google
– Six géants technologiques ciblés par le Digital Markets Act européen


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