Par , publié le 10 septembre 2023

Fin mars, lors d’un voyage à Pékin, Tim Cook vantait une “relation symbiotique” entre Apple et la Chine. Cinq mois plus tard cependant, la marque à la pomme ne semble plus pouvoir passer entre les gouttes des tensions géopolitiques sino-américaines. Ces dernières semaines, le régime chinois a en effet décidé de bannir l’iPhone de plusieurs administrations et entreprises publiques. Il est encore difficile d’estimer l’ampleur de cette mesure, car aucune communication officielle n’a été faite. Mais plusieurs millions de personnes pourraient être concernées, pénalisant les ventes de la société sur un marché stratégique, qui compense depuis quelques mois la faiblesse du marché américain. Les analystes de Bank of America anticipent jusqu’à dix millions d’iPhone vendus en moins par an.

Millions d’emplois – En Chine, Apple a longtemps fait office d’exception. Contrairement aux autres géants technologiques américains, le groupe de Cupertino n’a que très rarement été inquiété par les autorités chinoises. Et la riposte redoutée après la mise en place de sanctions contre Huawei par Washington ne s’est jamais matérialisée. Mieux encore, Apple a profité des difficultés de la marque chinoise, privée notamment de puces 5G, pour gagner des parts de marché dans le pays. La bienveillance de Pékin s’explique en partie par le poids que représente le groupe en Chine, où ses sous-traitants emploient des millions de personnes. L’assemblage des iPhone dans les usines locales est ainsi vu comme un symbole de la puissance de l’industrie chinoise, la seule capable de répondre aux besoins de production.

Relocalisation de la production – Cette mesure s’inscrit dans une volonté de ne plus utiliser des technologies étrangères dans les domaines sensibles. L’an passé, Pékin avait ainsi interdit, dans certaines administrations et entreprises publiques, les ordinateurs de marques étrangères, dont les Mac d’Apple, au profit de produits chinois, comme les PC de Lenovo. Mais l’interdiction des iPhone pourrait aussi signaler le début d’un changement radical des autorités chinoises vis-à-vis d’Apple, rattrapé par l’escalade des sanctions américaines pour empêcher la Chine d’avoir accès aux puces les plus avancées. Et ce n’est aussi peut-être pas un hasard que cela intervienne au moment où la société relocalise une partie croissante de sa production dans d’autres pays. À commencer par l’Inde, autre rival politique de la Chine.

Discours patriotiques – Autre “hasard”: ces restrictions coïncident avec le lancement du premier smartphone 5G de Huawei depuis plus de trois ans. Un appareil qui serait équipé du premier système sur puce gravé en 7 nm par un fabricant chinois, une avancée majeure pour le pays. Certains analystes prédisent plus de 10 millions d’unités vendues pour ce smartphone, accueilli en fanfare et rapidement en rupture de stocks. Avant les sanctions, la marque faisait jeu égal sur le segment haut de gamme du marché, désormais dominé outrageusement par Apple. Le changement d’attitude de Pékin et le retour au premier plan de Huawei menacent désormais de raviver les discours patriotiques. C’est le plus gros risque pour Apple, qui pourrait alors perdre une frange des consommateurs chinois.

Pour aller plus loin:
– Avec son dernier smartphone, Huawei déjoue les sanctions américaines
– Pourquoi Apple accélère l’assemblage de l’iPhone en Inde


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