Par , publié le 18 septembre 2023

Ces dernières années, la Corée du Sud n’a pas été qu’une source de succès pour Netflix, à l’image du carton phénoménal de la série Squid Game. En coulisses, le pays a également été le théâtre d’un long affrontement judiciaire, qui a rapidement pris une tournure politique. Ce conflit a cependant pris fin lundi avec l’annonce d’un accord à l’amiable avec SK Broadband, le deuxième fournisseur d’accès à Internet coréen. Depuis quatre ans, celui-ci réclamait des dizaines de millions de dollars à la plateforme américaine de streaming vidéo, afin de compenser la hausse de ses coûts liés à la consommation croissante de bande passante. Au-delà de la somme à payer, relativement peu élevée, Netflix redoutait surtout de créer un précédent, qui aurait pu inspirer des régulateurs ou des opérateurs dans d’autres pays.

Netflix battu en justice – Théoriquement, la loi sud-coréenne prévoit que les sites générant le plus de trafic Internet doivent rémunérer les fournisseurs d’accès. En pratique, ce texte est peu appliqué. Fin 2019, SK avait saisi le régulateur des télécoms, puis la justice faute d’avancée notable. Si le groupe a finalement obtenu gain de cause à l’été 2021, il n’a jamais touché les 27 milliards de wons (19 millions d’euros) qu’il réclamait à Netflix pour l’année 2020. L’affaire devait en effet encore être examinée en appel. Les deux groupes n’ont pas communiqué les détails de leur accord financier. Des sources citées par le Korea Economic Daily indiquent cependant que SK va obtenir une compensation financière. L’opérateur va aussi commencer à commercialiser les abonnements de Netflix auprès de ses clients.

Neutralité du net – La bataille entre Netflix et SK avait également gagné le parlement sud-coréen, où plusieurs projets de loi ont été déposés. Le fournisseur d’accès, filiale de SK Telecom, le premier opérateur mobile du pays, assurait que la contribution de la plateforme de streaming était primordiale pour qu’il puisse continuer d’investir dans son infrastructure réseau. Et il soulignait que Naver et Kakao, les deux géants Internet sud-coréens, avaient accepté, eux, de payer. De son côté, la société américaine mettait en avant la neutralité du net, un principe fondateur du web qui assure une égalité de traitement entre tous les acteurs. Elle expliquait aussi avoir beaucoup investi dans des réseaux de diffusion de contenu (CDN), qui permettent justement de réduire drastiquement la consommation de bande passante.

Débat en Europe – Le débat sur la participation financière des géants du web n’est pas limité à la Corée du Sud. Aux États-Unis, les câblo-opérateurs avaient obtenu l’abandon de la neutralité du net en 2018, avant que celle-ci ne soit rétablie il y a deux ans. En Europe, plusieurs pays, dont la France, militent pour un projet de réglementation visant à mettre en place une “contribution juste”, en particulier de Netflix et YouTube, pour financer le déploiement et l’entretien des réseaux Internet, comme la fibre optique et la 5G. Poussé par le lobby des opérateurs télécoms, le texte est soutenu par la Commission européenne. Mais il se heurte à l’opposition de l’Allemagne et de l’Irlande, où les grands groupes américains ont installé leur siège européen. Le projet n’est pas définitivement enterré. Mais il pourrait bientôt l’être.

Pour aller plus loin:
– Comment Netflix va empêcher le partage de compte
– Pourquoi Netflix lance un abonnement avec publicités


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