Par , publié le 18 juin 2023

À l’été 2022, Insights Partners ambitionnait de lancer un nouveau fonds doté d’une enveloppe de 20 milliards de dollars pour investir dans des start-up. Mais un an plus tard, la firme new-yorkaise est encore très loin d’en avoir bouclé le financement: selon un document consulté par le Financial Times, elle n’a en effet récolté que 2 milliards auprès de ses investisseurs – les Limited Partners ou LPs dans le jargon du capital-risque. Même si les dirigeants d’Insights ne désespèrent pas d’atteindre la barre de 15 milliards, cet épisode illustre une nouvelle réalité pour les fonds de capital-risque (les VC), rattrapés à leur tour par la fin de l’argent facile en raison du resserrement des politiques monétaires des banques centrales pour lutter contre l’envolée de l’inflation.

Chute des collectes – Insights n’est pas un cas isolé. Pour son nouveau fonds lancé fin 2022, le géant américain Tiger Global, qui faisait partie jusqu’à l’an passé des investisseurs les plus actifs dans le monde des start-up, n’a réussi à lever que 2 milliards de dollars. C’est six fois moins que pour le précédent et trois fois moins que ses intentions initiales. Autre exemple: TCV a récolté moins de la moitié de son objectif, d’après The Information. Au premier trimestre, les fonds de capital-risque américains n’ont levé que 11,7 milliards de dollars, selon les données du cabinet Pitchbook. Très loin des 73,8 milliards recueillis début 2022 – un niveau record. En Europe, la tendance est similaire, même si le déclin est moins marqué: 3,4 milliards d’euros levés entre janvier et mars, contre 7,4 milliards l’an passé.

Dominos – La chute des collectes de fonds est le dernier domino à tomber depuis la hausse des taux d’intérêt, qui a stoppé net l’euphorie autour des entreprises technologiques. Fin 2021, les actions du secteur ont commencé à chuter fortement, en particulier celles des sociétés tout juste entrées en Bourse qui affichent, pour la plupart, de lourdes pertes. Ce spectaculaire renversement a ensuite gagné les start-up. Il s’est traduit par un plongeon des levées de fonds (-53% au premier trimestre 2023), par des valorisations en chute libre (à l’image de Klarna, le spécialiste suédois du paiement fractionné) et par l’arrêt total des introductions en Bourse. Dans ce contexte peu favorable, les perspectives de gains apparaissent désormais bien plus incertaines pour les LPs.

Liquidités disponibles – En attendant d’éventuels retours sur investissement, ces investisseurs continuent de verser des commissions aux fonds de capital-risque – généralement 2% par an. Et ils constatent qu’une grande partie des financements visent à soutenir des sociétés dans lesquelles les VC ont déjà investi, simplement pour éviter de tout perdre. Cette chute des collectes pourrait menacer la reprise des levées de fonds pour les start-up. Ces derniers mois, les plus optimistes soulignent que les fonds ont accumulé des montagnes de liquidités, qu’ils vont bien devoir déployer un jour. Mais ces réserves commencent désormais à baisser, prévient le cabinet Pitchbook. En particulier en Europe, “où les fonds pourraient avoir du mal à fournir un soutien supplémentaire à leurs investissements existants”.

Pour aller plus loin:
– Après une année record, les levées de fonds de la French Tech s’effondrent
Plus de 100.000 licenciements dans la tech en 2022


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