Par , publié le 16 septembre 2023

Fin mai, Sam Altman, le patron d’OpenAI, avait suscité un tollé à Bruxelles, en menaçant de quitter le continent en cas d’une réglementation trop stricte sur l’intelligence artificielle générative – avant de rétropédaler dès le lendemain et d’assurer que ses propos avaient été mal compris. Quatre mois plus tard, la start-up américaine, qui a conçu le robot conversationnel ChatGPT et le générateur d’images DALL-E, va ouvrir un bureau à Dublin, où sont déjà installés quasiment tous les géants américains du numérique. Un petit bureau certes, qui comptera moins de dix employés au départ. Mais cette annonce symbolise un premier pas vers l’Union européenne. Et la prise de conscience qu’il faut mieux travailler avec les régulateurs, plutôt que de s’engager dans une bataille frontale avec eux.

“Influencer Bruxelles” – Installée à San Francisco, OpenAI s’était déjà implantée à Londres au début de l’été. Son bureau irlandais sera le premier au sein de l’Union européenne. La société propose neuf postes à Dublin. Elle recherche un directeur des affaires juridiques, qui devra “s’assurer de la mise en conformité avec les régulations européennes”, comme l’AI Act et le Digital Services Act. Le premier texte vient d’être adopté par le Parlement, ouvrant une période de négociations avec le Conseil et la Commission. Il devrait notamment imposer la mise en place d’un système d’identification des contenus créés par l’IA. Le second texte est déjà partiellement entré en vigueur, et il s’appliquera à OpenAI en février 2024. Le nouveau responsable de la start-up devra, par ailleurs, “influencer les politiques européennes”.

Pas le siège européen – OpenAI précise que ce bureau ne sera pas son siège social européen. Cette distinction, apparemment banale, entraîne deux répercussions majeures dans le cadre du Règlement général sur la protection des données (RGPD). D’abord, la start-up ne sera toujours pas soumise au régime du guichet unique, qui prévoit que les entreprises non européennes soient régulées par l’autorité du pays où est installé leur siège, généralement la DPC irlandaise. Cela signifie qu’elle peut être poursuivie par n’importe quel régulateur du continent. En contrepartie, OpenAI échappe à certaines obligations, en particulier à celle de mener des études d’impact avant de lancer de nouveaux produits. Ce lourd processus a été à l’origine de la sortie décalée en Europe de Bard, le concurrent de ChatGPT développé par Google.

Double discours – Ces derniers mois, Sam Altman tient un double discours sur le rôle des autorités face au progrès rapide de l’IA générative, demandant l’aide des gouvernements puis s’inquiétant du risque de “surréglementation”. Le patron d’OpenAI milite aussi pour la création d’une autorité internationale, mais qui ne se pencherait que sur les prochains services d’IA. Et pas sur les modèles actuels. De fait, ses multiples propositions semblent avoir pour objectif de limiter au maximum la régulation du secteur. Voire d’en profiter. Il s’est, par exemple, prononcé pour un système de licence délivrée aux entreprises développant des modèles sophistiqués. Une idée qui pourrait handicaper les petites start-up et les projets open source, concurrents potentiels du créateur de ChatGPT.

Pour aller plus loin:
– Le double discours d’OpenAI sur la régulation de l’IA
– ChatGPT fait perdre plus de 500 millions de dollars à OpenAI


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